28/02/2006
Les gens à Bogo
Et voila, Bogo c'est fini. J'y ai passé trois très très bonnes semaines. J'ai pris le temps de découvrir cet endroit vraiment magnifique et j'ai rencontré énormément de personnages attachants. La vie d'un petit village africain, avec toutes les personnalités qui l'animent. Tout d'abord Dovi, le directeur du CEG, extrèmement sympathique et intéressant, qui fait un énorme travail pour Atumgba en assurant le contact entre la France et le village. Pour que les projets de l'association fonctionnent il est essentiel qu'il y ait des gens sérieux et efficaces sur qui on puisse s'appuyer. Le village a de la chance de l'avoir car souvent dans l'humnitaire des projets échouent faute de gens sérieux sur qui s'appuyer...
Mais il y a d'autres personnes au village qui se bougent pour la communauté : Anoumou, le fameux Anoumou. C'est le jeune ministre de la guerre du village. Ah, il est fier de son titre et rappelle à la moindre occasion qu'il est invaincu et ne craint personne. Mais passé cette première impression, c'est un jeune homme aussi très sérieux qui se donne beaucoup pour le village, notamment pour l'éducation des jeunes. C'est aussi lui qui a fait le travail de recueillir tous les témoignages des anciens, les contes et légendes. C'est un peu l'érudit avec une grosse mémoire. Il est également capable de vous sortir par coeur toutes les statistiques du championnat de France de Football. Ca parait incroyable dans ce petit village sans électricité et télé. Mais on ne se rend pas compte en France que tous les Africains d'Afrique francophone suivent au jour le jour avec beaucoup d'attention tout ce qui se passe chez nous. Tout le monde écoute RFI à la radio tous les jour. C'est ainsi qu'au fin fond de la brousse, on peut entendre un débat sur les cotisations de l'assurance chomage en France... C'est très très décalé... Et donc beaucoup suivent le championnat de France car il y a pleins d'Africains qui y jouent. Et Anoumou ne se lasse pas de réciter par coeur les meilleurs buteurs des 3 dernières décennies ou tous les vainqueurs de la coupe du monde. Mais Anoumou il se donne aussi beaucoup pour le village, il donne des cours particuliers aux 3ème pour les aider à avoir le BEPC.
Mais c'est pas le seul à se dévouer pour l'éducation dans le village. Heureusement que le village se prend en main car s'il ne devait compter que sur l'Etat, il n'y aurait que 2 instituteurs en primaire pour près de 200 élèves... Alors il y a des habitants du villages qui se dévouent pour faire les instituteurs volontaires. Je les admire beaucoup car c'est un travail énorme et pourtant ils sont quasiment bénévoles. Les parents d'élèves essaient de les payer un peu mais comme tout le monde est pauvre, les volontaires doivent se satisfaire de 5000 CFA (7 euros) par mois. (pour se rendre compte le "SMIC togolais est de 30 euros et un pain par exemple coute 200 F). Je ne sais vraiment pas comment ils font pour vivre. Ils ont 6 heures de cours par jour du lundi au vendredi. A cote de ca il faut qu'ils preparent leurs cours chaque soir, qu'il corrigent les devoirs. Et le samedi ils vont aux champs pour faire leurs cultures vivrieres, ce qui leur permet de se nourrir. Et en plus de ca, ils trouvent encore le temps de s'investir dans la vie du village : Jean Gassou, l'enseignant du CE2 est secrétaire du comite de gestion du centre de soin, et aussi secrétaire d'Atumgba Bogo et il s'occupe aussi de la bibilotheque. Et Kokou, l'enseignant du CP est aussi "maitre chanteur" et il dirige tous les soirs la chorale du village, et il est bon, parce que la chorale je l'ai entendu, c'est un régal.
Si vous allez à Bogo, vous rencontrerez aussi Banissi, le président d'Atumgba-Bogo, que je n'ai jamais vu sans son grand sourire aux lèvres. En plus de ses caféiers, il s'occupe d'enseigner l'Igo aux habitants. L'Igo, c'est la langue locale du village. C'est une langue parlée par 7000 personnes au plus et qui est classée en voie d'extinction par l'UNESCO. La langue est très parlée au village mais le probleme c'est que à l'école, c'est le francais qu'on apprend et du coup les habitants ne savent pas lire et écrire leur langue. Alors Banissi, depuis quelques années donne des cours du soir en igo aux habitants, et pour qu'ils aient quelque chose à lire, il s'atteler à traduire un best seller : le Nouveau Testament. C'est un gros travail qu'il vient de terminer le mois dernier. Et maintenant pourquoi ne pas traduire les guides techniques agricoles ramenés de Songhai. Certains habitants en ont fait la demande.
Il y aussi quelqu'un que je suis content d'avoir rencontré. je ne l'ai croisé que la veille de mon départ : Ferdinand. Qu'est ce qu'il fait Ferdinand? Du reboisement. Ca me fait vraiment plaisir de voir qu'il y a des gens du village qui s'occupent de ce probleme. Parce que le déboisement, c'est un probleme qui me fait assez peur pour le village. Ils ne se rendent pas compte mais ils sont en train de détruire leurs forêt et ils ne se rendent pas compte des conséquences à plus ou moins long terme : assèchement du climat, érosion des sols, perte de biodiversité et j'en passe. Alors Ferdinand, avec quelques autres personnes du village s'occupe de faire des pépinières ou il fait pousser toutes sortes d'arbres puis il va les planter sur les parcelles deboisées ou il fournit des plants aux villageois. Ils ont aussi fait quelque chose de tres efficace : ils ont réussi à stopper les feux de brousse depuis 3 ou 4 ans grace à une surveillance constante. ces feux de brousse sont normalement interdits mais les paysans ne connaissent que cette méthode pour défricher. le problème c'est que c'est dur à controler. Et en plus, ils ne le savent pas, mais les feux de brousse, ca appauvrit beaucoup le sol et ca explique que les cultures locales aient des rendements de plus en plus faibles depuis quelques années. Enfin bref, Ferdinand et ses amis ont decidés d'aller voir personnellement tous les auteurs de feux de brousse et de les menacer d'amende. Et ca marche. Les feux de brousse sont devenus très rares dans la vallée et l'effet ne se fait aps attendre. les sommets des montagnes qui entourent la vallée, qui étaient completement deboisés, commencent déja à se recouvrir de végétation. le probleme c'est que cette végétation n'est plus la meme que celle d'origine, avec notamment beaucoup moins de variété qu'avant. c'est pourquoi ils vont y replanter les especes d'origine. Un tres gros travail. Et comme les autres gens actifs du village ferdinand est impliqués dans pleins d'autres projet : sensibilisation au SIDA, croix rouge, etc...
Et dans les personnalités du village, il y a aussi le représentant du Chef : Papa Sou. Il est très important car le chef n'est quasiment jamais là, donc c'est lui qui s'occupe des affaires courantes du village. Il s'occupe d'organiser les travaux communautaires et surtout il regle les conflits entre villageois. Et c'est sur ce point la que je l'admire. Il parait pas comme ca mais il est tres fort : un fin diplomate et surtout un tres bon sociologue. j'ai pu en faire l'experience pour une affaire dont j'ai occupé le premier roleet où il a vraiment assuré. je lui tire mon chapeau. De quoi est ce que je suis entrain de parler? Et bien je vais vous demander patience, parce que c'est vraiment un roman, mais je vais essayer de vous raconter ca prochainement. Une histoire où il y a un peu de cette magie africaine...
Et le chef du village. Il faut que je vous en parle aussi. Il est très occupé et pour cause : il est un des proches conseillers du feu "président" Eyadéma Gnassingbé et est toujours aussi actif auprès du nouveau "président", le fils Gnassingbé. Mais j'ai quand même eu la chance de le rencontrer lors d'une de ses visites éclair au village. C'est un homme tres intéressant qui connait par coeur l'histoire et les problemes de son village et qui est capable de vous en parler pendant des heures non stop. Il est s'est montré très intéressé par notre projet de création d'un centre de formation agricole du type Songhai (je vais vous en parler un peu plus tard de ca aussi) et il nous a apporté tout son soutien. Mais je me pose des questions sur le personnage quand meme. Parce que si c'est un des membres influents du parti au pouvoir, il a de grosses responsabilités sur la situation catastrophique dans laquelle ce parti a mis le Togo. Alors que penser. Il parait que c'est un sage et c'est vrai qu'en ce moment il travaille sur un projet positif : une commission sur le désarmement. Est ce que son objectif serait de transformer le régime de l'intérieur, de le modérer? Dans ce cas il n'est pas tres efficace parce que ca fait près de quarante ans qu'il est dans les rouages du pouvoir et tout ce qu'on peut dire c'est que c'est de pire en pire. Et que dire aussi de son frere, qui a été premier ministre du Togo, il y a 5 ans. Il s'est construit une magnifique maison à Bogo. Surplombant le village, elle est visible de toute la vallée. Et bien cette maison qui a du coûter des millions, il ne l'a jamais habitée. Et pendant ce temps le villageois en dessous vivent sans eau et sans electricité. Le Premeir ministre a bien dépensé des millions pour detourner un ruisseau vers sa maison, mais ensuite, il n'y avait plus d'argent pour continuer la cananlisation sur quelques centaines de metres pour amener l'eau sur la place du village. Alors les femmes du village doivent monter plusieurs fois par jour remplir leurs bassines au robinet de la maison du ministre... A vous de juger de la situation...
Pour finir, j'ai amené au village un nouveau personnage intéressant : Aube. C'est l'étudiant Songhaï dont je vous avais parlé. Il est extrémement interessant. Je l'ai fait venir au village pour qu'il raconte son expérience au villageois. On a fait des expériences de compost au collège. On a aussi fait un débat sur l'agriculture avec les collégiens. Ca c'était super interessant, on a essayé de leur montrer qu'ils pouvaient gagner de l'argent dans l'agriculture avec un minimum de formation. Parce que pour l'instant, les collegiens si on leur demande, il n'yen a pas un seul qui veut rester au village, ils veulent tous partir a Lomé. Ils ne savent pas qu'a Lomé, les étudiants diplomés sont obligés de faire moto taxi parce qu'il n'y pas de travail. On a essayé de leur faire prendre conscience de ca, de ne pas croire que c'est toujours mieux ailleurs, qu'il faut s'impliquer la ou on est si on veut que ca soit mieux... Et ce qui est encore plus interessant, c'est le projet de création d'un centre de formation agricole à proximité. Si ca marche, cela va devenir rien de moins que le premier centre Songhaï au Togo. Comme vous pouvez deviner ca m'enthousiasme beaucoup et on lui apporte le soutien qu'on peut. Je vous en reparlerai aussi sans doute plus tard, parce que ca va commence dès fin mars, avec le début de la saison des pluies. Des villageois de Bogo se sont montré intéressés pour suivre la formation donc j'attends beaucoup beaucoup de ce projet. Voila, voila, à suivre...
19:53 | Lien permanent | Commentaires (2)
26/02/2006
De retour du village
Bonjour à Tous!
Me voici de retour de Bogo. Tout va bien, c'était génial. J'ai des milliards de choses à raconter mais je vais attendre d'être à Lomé pour vous écrire tout ça car ici, à Kpalimé le centre internet est pas super performant et je viens de perdre un long message que j'avais écrit à cause d'un bug. Donc soyez patients et surveillez le blog dans la semaines, les histoires vont arriver...
13:03 | Lien permanent | Commentaires (1)
11/02/2006
Bogo
Bonjour à tous
je suis dans le petit village de Bogo depuis lundi et franchement c'est excellent. L'endroit est magnifique, perdu au milieu des montagnes recouvertes de forêt tropicale, le petit village est très joli avec ses maisons en terre et le gros baobab au centre du village, et les gens sont adorables. On m'emmène en balade dans la forêt, on me fait visiter le village. Je suis très bien accueilli parce que je suis considéré comme le représentant de l'association Atumgba, et l'association d'Atumgba a fait beaucoup pour le village, pour l'école, pour le centre de soin. Quand on évoque le nom de Marie Claire et Jean Pierre, tout le monde fait des grands sourires... Alors c'est vrai que le village est très attachant et que les conditions de vie sont difficile, alors on a vite envie de les aider, et il y a tant à faire. Il n'y a pas d'eau, il faut puiser à la rivière, il n'y a évidemment pas d'éléctricité et le téléphone vient d'être coupé suite à une mauvaise gestion du gérant de la cabine. Pour se rendre à la ville pour aller vendre au marché. Ca coûte très cher et le taxi est rare. Cette semaine, j'ai parcouru le village et les environs pour me rendre compte de la situation, notamment voir l'impact de la déforestation et la situation de l'agriculture.
Pour ce qui est de la déforestation, l'endroit est encore bien boisé, la forêt est magnifique c'est vraiment incroyable la variété d'arbres, je n'ai jamais vu ça. Sans mentir, il y a plusieurs centaines d'espèce, rien que pour les arbres, et ça fait toute sorte de fruits, de fleurs. C'est trop beau, j'adore. Mais c'est vrai que attention à la déforestation. On entend les tronçonneuses dans la vallée. Et les petites parcelles cultivées partent à l'assaut des flancs de la colline, malgré les pentes incroyablement raides. Alors je me pose des questions sur l'érosion des sols. les paysans m'affirment qu'il n'y a pas de problème mais j'ai des doutes, surtout qu'on voit la roche apparaître à plusieurs endroits. Mais que faire? L'agriculture est la seule source de revenu, mais c'est clair que c'est vraiment pas rentable pour le travail que ça demande. Ils cultivent leurs petites parcelles sur les versants à la houe, ça met des jours pour labourer. C'est un travail de dingue, surtout qu'il faut tout transporter à dos d'homme. Et puis c'est la culture sur brulis. Ils cultivent un an puis laissent en jachère 5 ans. Mais c'est vraiment pas productif.
Pourtant, si on veut aider le village durablement, je pense vraiment qu'il faut chercher à développer une agriculture plus rentable et plus respectueuse du milieu. Et pour ça, je m'intéresse beaucoup à l'expérience Songhai. Vous vous rappelez ce centre de formation en agriculture biologique, au Bénin. Avec Atumgba, on a acheté une dizaine de guides techniques agricoles que j'avais trouvé au centre Songhai, à Porto Novo. J'ai distribué ça et les premiers qui ont regardé ont l'air bien intéressés. Ca parle de plein de choses toutes simples qu'il faut juste savoir. Alors j'aimerais bien que ça leur donne des idées. On va voir ce qui est réalisable sur le site car c'est quand même bien encaissé. Mais je pense qu'il y a pleins d'idées à appliquer, notamment en agroforesterie, et puis aussi l'utilisation du compost pour le jardinage.
Je dois vous dire que Songhai m'enthousiasme vraiment, vous l'avez peut être remarqué, et le hasard fait bien des choses car figurez vous qu'à Noël, quand on faisait des animations pour les enfants, j'ai rencontré un étudiant du centre songhai. Il habitait juste derrière chez nous. C'est incroyable parce que ça doit être un des seuls togolais à avoir suivi cette formation qui est au Bénin, et je suis tombé dessus. Et encore le hasard, il habite pas loin du terrain que l'association Atumgba envisage d'acheter pour l'asso. Et encore coincidence, il est en train de monter un projet pour fonder un centre songhai au Togo mais cherche de l'aide. Alors tout ça c'est méchamment intéressant et il faut profiter de cette coincidence. Mercredi, on va le faire venir au village de Bogo pour une rencontre avec les paysans et il va peut être nous donner de bons conseils. Enfin voila c'est super intéressant tout ça.
En attendant, dans la semaine, j'ai fait quelques interventions au collège. Je leur ai parlé pendant deux heures de la protection de l'environnement et de la biodiversité... Est ce que c'est complètement décalé quand on voit la situation de pauvreté dans laquelle ils sont? Pas si sûr. Pendant deux semaines je vais les bassiner avec ça, ca va peut être leur donner des idées. Et puis on va essayer de mettre en pratique aussi. On va essayer d'en faire du composte, comme indiqué dans le guide.
Voila, voila je m'occupe bien. ce week end je suis revenu à Kpalimé, la ville voisine, mais lundi, j'y retourne pour deux semaines. Cette semaine j'avais logé chez le directeur du collège qui est l'intermédiaire d'Atumgba, mais les villageois ont fait une crise de jalousie disant que le directeur voulait garder le "blanc" pour lui tout seul. Alors pour éviter la crise, la semaine prochaine, je vais être logé en grande pompe dans la maison du chef...
18:45 Publié dans Togo | Lien permanent | Commentaires (2)
07/02/2006
En route vers de nouvelles aventures!
Et voilà, après un mois je quitte la sympatique école primaire d'Adamavo. Pour finir, vendredi on a fait une kermesse avec des jeux le matin et un spectacle l'après midi. C'était vraiment très sympa. Des amis sont venus chanter, les enfants avaient préparé des petites scénettes et à la fin on a chanté tous ensemble les chansons qu'on a apprises pendant un mois. C'était quand même bien émouvant. je suis triste de partir si vite mais bon, je repasserai avant de revenir en France.
Maintenant je vais aller passer quelque temps dans le petit village de Bogo à 200 km au nord-ouest de Lomé, dans les montagnes. Ca devrait bien changer de la ville. Un peu de nature fera du bien. Et surtout il y a un projet intéressant la bas:
L'association Atumgba apporte son aide au village. Elle cherche comment investir pour que l'association gagne l'argent argent nécessaire à la scolarisation des enfants. Pour cela le projet serait d'acheter un grand terrain (6 ha) situé non loin du village, et de le planter. Le produit de la récolte pourrait rapporter un peu d'argent.
09:45 Publié dans Togo | Lien permanent | Commentaires (1)
02/02/2006
Des déchets partout!
Alors, je vais vous parler d'un sujet qui me tiens à coeur et qui de toutes façons est un aspect important de la vie au Togo : les déchets... Franchement, c'est ce qui me gène le plus ici. C'est omniprésent, il y a des déchets partout, mais alors absolument partout... En particulier ces satanés sacs en plastique noir.
Alors d'où vient le problème? Je vous ai parlé de tous ces vendeurs ambulants, de toutes ces petites échoppes. Et bien systématiquement quand vous achetez un petit truc, on vous met ça dans un sac en plastique noir, même si c'est un pain ou une orange. Et puis il y a aussi ces yaourts glacés qui sont si bons, mais qui sont également dans des emballages plastiques. Bon bref, le progrès est arrivé et maintenant beaucoup de choses sont dans des emballages plastiques comme chez nous. Le problème, c'est que c'est arrivé très vite en quelques décennies. Avant tout les emballages étaient biodégradables, en feuilles de bananier par exemple. Et le geste, quand on avait fini, on jetait! Et le problème c'est que le comportement n'a pas évolué. Quand on a fini, on jette par terre, n'importe où : dans la rue ou chez soi. C'est assez choquant quand même ce geste de jeter n'importe où, même chez soi. Alors en fait tout les matins, ils balaient la cour et c'est à ce moment qu'ils ramassent les déchets. Mais dans la rue, personne ne ramasse...
Et moi, je suis bien embété quand je me retrouve avec un sac plastique. J'y peux rien c'est psychologique, je n'arrive pas, moi, à jeter par terre comme ça. Mais il n'y a pas de poubelles! Alors comme un malin, j'accumule les sacs plastique dans ma poche. Ca retarde l'échéance mais je ne peux pas tenir indéfiniment. Parfois quand même je trouve une corbeille, donc je peux jeter. Mais le plus fort quand même, c'est que quand je mets mes déchets dans la corbeille, tous les togolais se marrent, limite ils se moquent de moi. C'est pour dire qu'il y a encore du boulot pour changer les mentalités.
Alors jeter les déchets par terre c'est pas bien, et c'est bien ce que je comptais leur dire aux enfants, à l'école. Mais c'est pas si simple de dire ça. Il n'y a pas de système public de collecte des ordures et il n'y a pas de poubelles publiques (si j'en ai vu quand même une fois j'en ai vu une. Une belle avec marqué "Propreté de Lomé". J'étais trop content et je me suis approché : elle n'avait plus de fond...). Donc je veux bien leur dire de ne pas jeter leurs déchets par terre mais ils vont les mettre où?
Je vous ai parlé de corbeilles à déchets quand même. En effet certaines familles paient de petites associations qui viennent ramasser les déchets dans de petites charettes à bras. Et donc, tous les trois jours ces familles mettent leurs corbeille de déchets devant chez eux. Mais ce n'est pas tout le monde qui paie. Et c'est pour ça qu'on me regarde avec des grands yeux quand je mets un déchet dans une de ces corbeilles, car ce sont des poubelles "privées". Et c'est pour ça qu'il n'y a pas de poubelles publiques dans la rue. Tous ceux qui ne paient pas le rammassage individuel iraient mettre leurs déchets domestiques dans ces poubelles qui seraient vite surchargées.
Donc ceux qui ne paient pas le ramassage, ils creusent un trou dans la rue et y mettent leurs déchets. Et donc il y a des rues où ils faut slalommer entre ces monticules de déchets. Ca sert à remblayer les ornières aussi...
Mais pour ceux qui paient le ramassage privé, où vont leurs déchets? Et bien en fait, avec leurs petite charettes, les associations vont simplement les déposer un peu plus loin, dans les espaces libres disponibles qui se transforment en véritables décharges en pleine ville. Quels sont les espaces libres : quelques terrains non construits, mais surtout, la forêt sacrée et la lagune. La forêt sacrée c'est une relique de l'ancienne forêt sacée vaudou qui occupait l'emplacement de Lomé. La ville s'est étendue et la forêt s'est réduite comme une peau de chagrin. Et ce qui reste de la forêt (quelques arbres) est aujourd'hui entouré par une montagne de déchets. Et on est en pleine ville. C'est assez catastrophique. Ces déchets polluent la nappe d'eau qui est seulement à quelques metres de profondeur et dans laquelle tous les habitants puisent leur eau. Alors tous les habitants du quartier sont plus ou moins malades. L'autre grand espace libre, c'est la lagune. Et là c'est encore pire. C'est un petit lac qui limite la ville au nord, large de moins de 500 m. Il n'y a pas d'exutoire donc l'eau stagne. Et c'est entouré par la ville. Etl n'y a pas de tout-à-l'égout donc les eaux usées se déversent directement la dedans. Et autour de la lagune, il y a quelques espaces libres non construits car c'est inondable. Et c'est donc devenu d'autres dépôts d'ordure. C'est vraiment glauque touc ces déchets. L'eau dégage une odeur putride. Elle est toute verte. Et ce qui est paradoxal c'est que le site de la lagune est très joli, limite pittoresque, bordé de cocotiers. Mais quand on s'approche ca redevient glauque. Et imaginez juste la situation pendant la saison des pluies: le niveau de l'eau monte et toute la ville située alentour est alors inondée par les eaux infectes de la lagune...
C'est pas simple du tout ce problème des déchets. D'un côté, les habitants jettent leurs déchets n'importe où, mais d'un autre côté il n'y a nulle part où mettre les ordures.
Alors il y en a qui se bougent quand même. Je vous ai parlé de ces associations qui se sont montées pour ramasser les déchets pour ceux qui veulent bien les payer. En France, on paie une taxe sur les ordures ménagères et c'est la commune qui gère ça. Au Togo, on ne paie pas les impots. Parce qu'on est pauvre, mais surtout parce que l'argent des impôts disparait systématiquement dans la nébuleuse obscure de l'administration centralisée (corruption? oui) C'est pourquoi les habitants préfèrent payer de petites associations. Là, ils sont sûrs que l'argent sera utilisé comme il faut. Donc pour lutter contre la corruption, le mieux est d'agir localement. Comme ça, on a un meilleur contrôle de l'argent. C'est pourquoi, certaines associations réfléchissent à impliquer les chefs de quartier dans la gestion des ordures. L'idéal serait que ce soit géré à l'échelle du quartier avec un impôt local obligatoire. Les gens le paieraient plus facilement car ils sauraient où va l'argent. Comme tout le monde paieraient, tout le monde aurait droit au ramassage et on pourrait ensuite mettre des poubelles publiques dans la rue, qui seraient elles aussi gérées par le chef de quartier. Donc la clef du problème serait une gestion locale, décentralisée. Certains y travaillent et c'est très intéressant. Mais l'autre aspect où il faudra agir c'est la sensibilisation du public, parce que mettre un papier dans une poubelle c'est vraiment pas ancré dans les moeurs. Plusieurs associations y travaillent également, mais s'il y a des bénévoles parmivous, n'hésitaient pas ils seront accueillis à bras ouverts. Il y a aussi des essais de tri de déchets et de recyclage. Une association avait commencé à fabriquer du compost à partir des déchets mais ils ont dû arrêté car ilsne trouvaient pas de débouchés : les maraichers préfèrent utiliser les engrais chimiques qui font pousser plus vite (même si les légumes sont moins bons) Il y a aussi quelques ONG qui font du recyclage de plastique, en fabriquant des vêtements par exemple. C'est des initiatives intéressantes qu'il faut soutenir.
Si on arrive à ça, on aura déjà bien avancé. Mais il faut quand même que l'Etat s'investisse un minimum pour la gestion des décharges principales, et surtout pour cette lagune qui est vraiment une catastrophe. Il faudrait au moins une station d'épuration. Il n'y en a même pas une seule à Lomé!
Bon à part ça tout va bien et tout le monde garde toujours le sourire! Et moi je sens que je vais revenir en France avec en guise de souvenirs quelques sachets de déchets que je n'aurais pas réussi à jeter...
PS : sinon, il y a aussi une solution toute simple que j'ai trouvé pour me débarasser des sacs en plastique. Et cette solution, ça marche aussi bien au Togo qu'en France :quand on me donne quelque chose dans un sac plastique, je refuse le sac plastique. Et si je ne peux pas me passer de sac, je réutilise un sac que j'ai déjà. Et tant pis si on me regarde avec des yeux ronds... La réduction des déchets à la base c'est surement le plus efficace. Mais là aussi, ily a un gros travail de sensibilisation à faire... A bon entendeur, salut....
20:45 Publié dans Des projets en Afrique | Lien permanent | Commentaires (6)