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25/10/2009

La France en stop

Quand on veut voyager mais que l’on a plus de 25 ans, ça devient hors de prix. Finie la carte 12-25 et le train pas cher ! Et comment on fait si on veut voyager quand même ? Ou bien on se met à travailler et on gagne des sous. (mais dans ce cas on n’a plus le temps de voyager) Ou alors on fait du stop. Et bé moi j’ai choisi la deuxième solution : je fais du stop. Et c’est comme ça que cet été j’ai découvert une nouvelle façon de voyager. Il faut avoir un peu de temps devant soi mais ça fait une bonne expérience, ça fait rencontrer plein de personnes qu’on n’a pas l’habitude de fréquenter. Allez, ça vous intéresse de savoir comment ça se passe le stop aujourd’hui ? Et bien suivez-moi dans mon magnifique périple de l’été…
Cet été, je pensais passer l’été en Italie et puis finalement avec Rosita on s’est dit qu’on irait bien faire un tour en France. Mais vu qu’on n’a pas de sous on s’est décidé à y aller en stop. Pour le stop le plus dur c’est de partir. Surtout quand on est dans une grande ville. Heureusement gros coup de bol, la veille du départ je rencontre Pierluigi à un repas et il me dit qu’il va en France le lendemain. Il va jusqu’à Antibes en voiture. Antibes ? Mais c’est sur ma route ça ! Je lui parle de la coïncidence et au final il m’invite à venir avec lui. Si c’est pas de la chance ça ? Je lui dit qu’on est deux avec deux gros sacs à dos et il me dit qu’il n’y a pas de problème ! Le lendemain on déchante un peu. La voiture, c’est une Micra. Et une Micra, comme on peut le deviner au nom, c’est minuscule. Et dans la voiture ils sont déjà trois, car en fait il y a deux amies qui viennent avec Pierluigi. Et le coffre de la Micra est déjà plein. Nous voici donc à 5 dans une Micra avec les gros sacs à dos sur les genoux, partis pour 10 heures de voyage. Le rêve quoi! On est à moitié étouffés sous les sacs et on regarde défiler les kilomètres en priant pour arriver le plus vite possible. On fait connaissance plus en détail avec Pierluigi, que je ne connais que depuis hier. Il est étudiant en droit et fait son stage dans un cabinet qui aide les plus démunis. Oh c’est gentil ça ! Son amie aussi est étudiante mais ça passion c’est la clownthérapie. C'est-à-dire qu’elle se déguise en clown et qu’elle va voir les enfants dans les hôpitaux et comme ça les enfants ils sont moins tristes d’être tout seuls à l’hosto. Très bien ! Et l’autre amie, elle cultive des châtaignes. Oui mais les roumains qu’elle embauche pour faire la récolte elle les paye plus que les autres exploitants (c'est-à-dire qu’elle les paye au SMIC) et du coup les voisins sont venus la menacer parce que selon eux ça fausse la concurrence, ça risque de les obliger eux aussi à payer leurs employés plus cher… Et bé dis donc, ce sont de braves personnes nos compagnons de voyage. Mais ça finit en grosse engueulade parce que la cultiveuse de châtaignes ne veut plus mettre sa ceinture parce qu’elle se sent oppressée et son amie la clown lui dit que c’est inadmissible, qu’elle va s’arrêter comme ça en plein milieu de l’autoroute si elle ne la remet pas mais l’autre insiste…
Enfin, alors que la nuit tombe, complètement ankylosé sous mon gros sac, j’aperçois le panneau de la frontière. La France ! On a réussi, on y est ! Encore une heure et on arrive. On se fait déposer sur la plage, on les remercie, on est bien content, puis ils nous disent que pour la participation aux frais d’essence et de péage, comme on avait dit, il faudrait donner un petit quelque chose. Ils ont calculé : 30 euros chacun… Plus ou moins le prix du train quoi… A ce prix là, ça ne valait pas la peine d’aller voyager coincés comme des sardines comme ça. Bon… On est un peu dégoutés. On installe la tente sur la plage. On fera mieux demain…
Le lendemain, on est super motivés. Notre objectif : Toulouse, chez mon parrain. On y croit, on va y arriver. Première chose à faire, rejoindre l’autoroute. Et oui, parce que maintenant, le stop ça se fait sur l’autoroute. Plus personne ne fait de grandes distances sur route nationale. Et puis l’autoroute, c’est plus rapide et confortable. L’auto-stoppeur aussi a ses exigences.. Une fois qu’une première voiture vous a pris il suffit de se faire déposer à une aire d’autoroute et ensuite on continue comme ça d’aire d’autoroute en aire d’autoroute. Mais le plus difficile est de trouver la première voiture qui vous amènera sur l’autoroute. Il faut trouver une bretelle d’accès et se mettre juste avant que les voitures accélèrent. Et encore avant il faut rejoindre la bretelle d’accès. On traverse comme ça à pied toute la zone commerciale d’Antibes et après un labyrinthe d’échangeurs et de ronds-points, on finit par trouver l’endroit idéal. L’entrée d’autoroute en direction de Marseille, juste après un rond-point, donc les voitures ne vont pas encore trop vite et un large espace sur le coté qui laisse la place à la voiture de s’arrêter. On pose les sacs, on lève le pouce et on se met à fixer chaque voiture les yeux pleins d’espoir. Il y a toujours la première phase d’euphorie. Puis, petit à petit, l’enthousiasme retombe. Personne ne s’arrête. Il n’est peut être pas si idéal que ça cet endroit. Et est-ce qu’une voiture a suffisamment de place pour s’arrêter ? Est-ce qu’ils ne sont pas déjà lancés en pleine accélération ? Alors on se décale un peu. On change de technique. Je dis à Rosita de s’assoir sur les sacs d’un air malheureux pour faire croire qu’elle ne se sent pas bien. Ou alors au contraire de se mettre devant comme ça ils voient la fille en premier. A la fin désespéré je suis sur le point d’utiliser la méthode de dernier secours : aller me cacher dans les buissons pour faire croire que Rosita est toute seule et surgir seulement quand la voiture s’arrête. Ca, ça marche à tous les coups mais je n’en suis pas très fier. Heureusement une voiture s’arrête avant. Le chauffeur nous fait signe de monter. Youpi ! On est tout contents et nous voilà partis !
Le conducteur de cette première voiture est un brésilien. Il vit en France depuis 9 ans. Comme tout bon brésilien il est super cool et très sympathique mais il est overbooké. Il est ingénieur spécialisé des tunnels et il travaille dans un petit bureau d’étude qui bosse dur. Il passe ses journées sur les routes à aller vérifier les chantiers et quand il rentre au bureau il continue de travailler jusqu’à 22h. Il se fait des semaines de 60 heures. Le week-end il ne peut pas se reposer car avec sa femme il faut qu’ils aillent voir leurs amis à Barcelone ou à Paris. Et des fois ils prennent des vacances mais ils partent à l’autre du monde faire des trekkings au Costa Rica ou au Pérou. Il m’épuise rien qu’à me décrire sa vie.. Mais sinon pour lui tout va bien, son métier l’intéresse, il aime bien la France et il carbure aux vitamines pour garder le rythme. Ouf !
Il nous dépose sur l’aire de repos d’Aix en Provence. On avance ! Il n’est même pas midi ! Mais là notre enthousiasme va vite retomber. On reste bloqué là. On va demander aux voitures garées mais tout le monde semble remonter sur Lyon, et les quelques voitures qui vont vers Montpellier n’ont pas de place pour deux. On patiente sous le soleil… Au bout d’une heure, une voiture d’Italiens finit par nous prendre. C’est un couple de Milanais qui vont en vacances en Espagne. Le mari doit avoir une soixantaine d’année mais il s’est teint les cheveux d’un horrible orange. S’il croit faire jeune comme ça, c’est loupé. Je leur raconte notre périple. Généralement par politesse, je fais la conversation, c’est une manière de payer le voyage. C’est un échange : ils nous prennent et nous, si ils veulent, on leur distrait le voyage. De fil en aiguille, ils finissent par nous dire ce qu’ils font dans la vie. Herbalife ! Et là ça commence à dégénérer… Herbalife, c’est un substitut de repas fait avec des plantes. Ce sont tous les éléments nutritifs dont tu as besoin pour la journée. Ca évite de grossir et ça te maintient en bonne santé. C’est gé-nial ! Et Herbalife, c’est des petits malins. Ca ne se trouve pas dans le commerce. Ce sont seulement les particuliers qui en vendent. Ils ont un système spécial. Je connais bien parce que deux fois à Naples alors que je cherchais un petit boulot, j’étais tombé là-dessus. N’importe qui peut vendre Herbalife à une condition. Consommer soi-même de l’Herbalife. Pour montrer l’exemple. Et pour chaque client que l’on trouve on touche un pourcentage. Et on peut même former des vendeurs. On touchera également un pourcentage sur ce qu’ils vendent. Et si ces vendeurs forment eux-mêmes d’autres vendeurs on touchera aussi un pourcentage sur ces autres vendeurs. Cela crée un système pyramidal et si on est malin on peut finir par se faire pas mal d’argent avec ça. Oui mais Herbalife, c’est limite une secte. Les gens qui bossent là dedans ils se retrouvent régulièrement tous ensemble à des séminaires pour s’auto-motiver et crier tous ensemble « oui, c’est bon herbalife ! » Et en fait la clé du succès de herbalife, c’est que les vendeurs vendent à leur propre famille et à leurs amis. Ce sont les meilleurs cibles. Et du coup, ils ne vivent plus que herbalife. Chaque réunion de famille ou chaque nouvelle rencontre est l’occasion de vendre du Herbalife. Principe assez infect au final. Et donc ça ne va pas louper. Notre couple va essayer pendant tout le voyage de nous convaincre que Herbalife peut nous changer la vie. « Regardez ma femme, vous lui donnez quel âge ? » Heu, on va être gentil on va dire 45 ans… Et lui, tout content : « Pas du tout elle a 60 ans ! » Bon c’est vrai qu’elle fait plus jeune, mais la teinture des cheveux ça aide pas mal aussi. Et puis, c’est pas tout il y a un nouveau produit qui vient de sortir, ça va etre la révolution ! Ca s’appelle Hydrogel. C’est de na nourriture en gel comme ce que mangent les astronautes. Il insiste pour nous faire gouter. Il nous en donne une confection. C’est marqué « saveur chocolat » Je regarde les ingrédients derrière. C’est que des noms bizarre genre « polycarbohydrate 14 » On hésite. « Allez-y goutez c’est super bon, c’est au chocolat » Bon je le tente. J’ouvre le bouchon, je presse. Ca sort comme du dentifrice. Beuh… Je ferme les yeux, je goute. Berk, c’est infect ! Il nous dit « c’est bon hein ? » « Bé en fait j’aime pas trop. » Mais il insiste « si, si c’est bon, c’est du chocolat » Et il ne s’arrête plus de parler en nous disant qu’on a de la chance de l’avoir rencontré, ça va nous changer la vie, que c’est vraiment révolutionnaire… Pendant deux heures il continue comme ça. A la fin on n’en peut plus, ils deviennent vraiment dingues avec leurs produits.. On se fait déposer, à la première aire d’autoroute que l’on rencontre et on les laisse continuer tout seuls pour aller passer leurs magnifiques vacances à bouffer de l’hydrogel…
Ouf ! Ca fait du bien quand ça s’arrête. On se retrouve à hauteur de Montpellier. On attend de nouveau un bon moment avant de se faire prendre par une nouvelle voiture. Cette fois-ci, c’est un type tranquille, la soixantaine mais les cheveux blancs pas teintés, conseiller agricole de son état, qui nous parle un peu des problèmes des exploitants agricoles. Mais il n’a pas le temps de s’étendre car il nous laisse un peu plus loin à Béziers. Enfin bon le problème du voyage en stop sur autoroute, c’est qu’on ne voit pas grand-chose des villes que l’on passe. Que ce soit Aix-en-Provence, Montpellier ou Béziers, tout ce qu’on voit c’est l’aire d’autoroute. Il y a bien quelques variantes entre les aires d’autoroutes mais faire le tour de France des aires d’autoroutes, je crains que ce soit un peu monotone…
On se fait prendre assez rapidement par un jeune « issu de l’immigration ». Il habite Carcassonne, c’est tranquille là-bas, il a plein de potes. Au bout de 5 minutes, il ralentit et s’arrête sur une petite aire de repos, la traverse et va se mettre derrière un gros camion garé là. Mais qu’est ce qu’il fabrique ? Il coupe le moteur et sort quelque chose de la portière avant… Ca ne vous dérange pas si je me roule un joint ? Heu, non non, pas de problème vas-y ! Puis il branche son MP3 sur l’autoradio, musique arabe à fond. « Ahhh, ça va mieux comme ça ! » Et il repart plein pot. Il nous parle de son dernier voyage chez papy et mamie au Maroc. C’est là qu’il a trouvé son petit gadget pour deux euros. Et puis l’herbe aussi ça ne coute pas cher là-bas. Ca lui plait bien le Maroc. Au final il est bien sympa. Le paysage est magnifique, on traverse des collines avec des cyprès des petite vignes, dans la lumière de fin de journée. On avance, on avance. Il nous dépose à Carcassonne.
Et pour finir, jusqu’à Toulouse on se fait prendre par un chouette couple, la quarantaine. Il font du rangement dans l’Espace pour nous faire de la place. Ils reviennent d’une semaine de rando dans les pays Cathare. Ils ont 4 enfants, mais ils se sont pris une semaine juste tous les deux, pour souffler. Ce sont des baroudeurs. Ils commencent à parler de la Mauritanie. Ils y ont vécu 2 ans avec les enfants. Le mari travaille comme géologue pour les compagnies minières. Ils racontent leur vie là-bas, les balades en 4x4 dans les dunes, les excursions au bord de la mer sur les plages désertes, les températures à 50°C. Ils disent qu’on s’habitue. Par contre, un peu l’ennui car il n’y a rien là-bas. Et puis il sont vécu aussi au Congo et surtout à la Réunion, pendant 5 ans. Ca, ils ont bien aimé la Réunion. C’est une ile merveilleuse avec une nature paradisiaque et surtout une population adorable, très bigarrée, colorée, métissée et d’une gentillesse et d’une tolérance exceptionnelle. On y trouve des communautés de créoles, d’indiens, de chinois, d’européens et tous se respectent et chacun participe aux fêtes des uns et des autres. D’après leur description, ça fait un peu rêver tout ça. Mais revenons en France. Le soleil se couche et nous voici arrivés à Toulouse. Mon parrain nous attends à la sortie de l’autoroute. Timing parfait. On a réussi notre première journée de vrai stop. Pas mal ! Ca marche bien le stop finalement, on va continuer comme ça.
Après Toulouse, direction les Pyrénées. On a de la chance, mon parrain nous emmène jusqu’à Gavarnie. C’est quand même bien agréable de se faire emmener d’une seule traite, c’est moins fatigant. Quelques jours dans les montagnes, puis on redescend vers Pau, chez ma marraine. De Gavarnie à Pau on retente le stop. On se fait prendre d’abord par une femme toute joyeuse qui revient du boulot, elle est toute contente de prendre des autostoppeurs, c’est sa folie de la journée. Puis un jeune en camion nous emmène jusqu’à Lourdes. Quand je dis camion, c’est en fait un utilitaire genre Renault Traffic. Depuis quelques années il y a plein de jeunes qui s’achètent ces vieilles fourgonnettes d’occasion, qui les repeigne en blanc, aménagent une couchette et une mini cuisine à l’intérieur et qui partent en vadrouille pour faire saisons agricoles. Et généralement, vu que ce sont eux-mêmes d’ex-autostoppeurs ils nous prennent volontiers. D’ailleurs à Lourdes c’est de nouveau un jeune avec un « camion » blanc identique au premier qui nous prend et nous fait même un détour pour nous déposer chez ma marraine.
De Pau à Arcachon, d’abord une jeune femme qui se rend au travail et qui nous dit c’est génial ce qu’on fait, qu’elle voudrait bien faire pareil et qu’elle nous envie. Puis une mère et son fils qui se rendent à Bordeaux pour chercher un appart’ pour le fils néo-étudiant. Ils nous laissent à Bazas. Pour rejoindre Arcachon il nous faut maintenant traverser la foret des Landes. C’est un peu comme une traversée du désert. On attend en plein soleil au bord de cette route en ligne droite qui se perd dans l’immensité des pins. Il y a plein de monde qui passe, des baigneurs qui se rendent à l’océan, avec tout les coffres bondés de parasols et de matelas gonflables. Au final c’est un Ch’ti qui nous prend. Il est passionné de vélo et il nous raconte l’univers du cyclisme amateur. Avec ses copains, dans le Nord, chaque semaine ils se font des sorties de plusieurs centaines de kilomètres. Il a déjà fait le Paris-Roubaix mais c’était super dur avec la pluie et la boue. Et quand il vient dans les landes il adore faire ces longues lignes droites. Il nous dépose dans un petit village au milieu des Landes. Il fait vraiment chaud mais heureusement s’arrête une grosse voiture avec la clim’. Ce monsieur est tout content, il vient de rentrer de vacances en Acadie. L’Acadie, c’est au Quebec ça ? Non c’est en Acadie. C’est une région à coté du Québec où on parle aussi le français et ça a l’air bien joli aussi. Il nous dépose un peu avant Biganos, à l’entrée de l’autoroute. Et là, grosse galère. On est à 20 km de chez mes grands-parents, on y est presque mais personne ne s’arrête. Deux heures sous le cagnard. Au final on renonce. On se décide à aller à pied à la gare qui se trouve à deux km. Deux kilomètres infernaux avec nos sacs trop lourds sous le soleil. Argh, on y arrive finalement mais cette fois ça n’a pas été une partie de plaisir et heureusement qu’il y avait la gare pas trop loin.
Le stop, c’est bien mais quand ça marche…

20:47 Publié dans Voyage | Lien permanent | Commentaires (6)