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10/01/2006

A l'école!

Jeudi 5 janvier, c'était la rentrée des classes au Togo. Encore un grand moment. Je vais aider les instituteurs de l'école du Jourdain pendant un mois. Présentons l'école. Elle est située à 15 kilomètres à l'ouest de Lomé, dans la banlieue lointaine.

L'école est une école confessionelle, méthodiste. Les Méthodistes, c'est une des variantes des Protestants. C'est assez incroyable le nombre d'églises différentes au Togo. S'il y a quelque chose qui marche bien au Togo aussi, c'est la religion, je vous raconterai. En tout cas ces églises ont quand même une utilité c'est qu'elles financent une très grande partie des écoles du Togo. C'est complètement anormal que ce soient elles qui s'occupent de ça, plutot que l'Etat, mais bon au moins ça fait des écoles pour les enfants.

Derick, le directeur m'avait dit que son école était toute récente puisqu'elle a été construite en 2002. Alors moi j'imaginais des batiments tout neufs, tout blanc, tout beaux. Pour changer j'ai encore tout faux. Les batiments de l'école, ce sont des paillotes avec des toits de tôle au milieu d'une cour de sable entourée d'une haie. Le sol des classes, c'est du sable. Du coup, pendant les vacances,les termites ont commencé à construire une termitière dans une des classes et à manger quelques tables en bois...

Au centre de la cour, le drapeau du Togo. Quand je suis arrivé, les enfants se sont mis au garde à vous... Repos! Petite présentation du Yovo qui va rester dans l'école pendant un mois, puis les enfants sont rentrés en classe au pas de marche en chantant. Drôle d'ambiance de caserne. La discipline... Mais c'est vrai qu'il en faut de la discipline :il y a 6 professeurs pour 300 élèves. En CP, il y a 74 élèves... En CM2, ils ne sont plus que 20. Le directeur, Derick, s'occupe des CM1/CM2, ça lui fait 60 élèves. Donc il est content que je vienne, je vais m'occuper des CM1. Lui pourra se consacrer aux CM2 pour les préparer au certificat d'étude qui est l'examen de fin de primaire pour rentrer au collège.

J'ai commencé à donner des cours aux CM1. On fait des dictées, du calcul mental, de la conjugaison, des problèmes. C'est sympa, ca me plait bien. Il y a des choses, en fait je les réapprends en même temps qu'eux : j'avais un peu oublié comment on fait une division (vous savez, vous?). Les élèves sont assez sages (moins qu'avec le directeur car je ne donne pas de coups de baguette, mais ça va quand même). Ils se battent pour aller au tableau, pour répondre aux questions. L'école ici c'est quand même bien différent de chez nous. Ce sont les enfants qui font toutes les taches ménagères. Ils balayent les classes et la cour, ramassent les déchets, arrosent les plantes, puisent l'eau du puit.

Vendredi après midi, on fait des chansons et des jeux. J'ai leur ai appris quelques chansons. C'était un peu impressionant de chanter tout seul avec la guitare devant les 300 élèves, mais quand ensuite tout le monde reprend en coeur, ça fait trembler les murs des paillotes... Il y a une chanson qui plait beaucoup, c'est Bella Ciao. Ensuite on a fait des jeux mais on n'était plus que 4 profs et gérer 300 élèves à 4 c'est pas de la tarte. C'était complétement le bordel, ca courrait dans tous les sens. C'était bien marrant, tout le monde était content. Mais il y a quand même des moments où on se sent submergé par tous ces enfants.

Franchement, moi je suis admiratif devant le travail des instituteurs. C'est  très prenant comme boulot, bien fatigant et ils sont payés une misère, vraiment : 22 euros par mois. C'est moins que le SMIC togolais et des fois ils ne sont pas payés pendant plusieurs mois. Je ne sais pas comment il font pour vivre parce que même au Togo ça ne fait pas beaucoup. C'est pour ça qu'il y a beaucoup d'instituteurs qui ont arrété leur travail pour faire taxi moto : ca rapporte bien plus. Ceux qui restent, ou bien ils ne font rien, ou bien c'est des super motivés. Et dans l'école où je suis, je trouve qu'ils sont bien motivés. Le directeur se donne vraiment à fond pour ses élèves. Et je suis bien content de venir lui donner un petit coup de main.

Le problème principal de l'école en général au Togo, c'est le manque d'argent. Il n'y a pas d'argent pour payer les professeurs, pour construire les écoles. C'est pour ça que l'école est payante et du coup il y a beaucoup de familles qui n'ont pas assez d'argent pour envoyer leurs enfants à l'école.

Pourtant de l'argent, plus je me renseigne et plus je me rends compte qu'il y en a au Togo. Mais c'est toujours les mêmes problèmes. Le directeur me racontait l'histoire d'un ancien ministre qui, avant de quitter son poste, a détourné pour lui tout l'argent destiné à la construction d'un lycée... Et il y en a plein des histoires comme ça... C'est assez désespérant... Mais bon, heureusement qu'il reste des personnes motivées... Et en plus ils gardent toujours le sourire. C'est ça qui est incroyable!

 

14:56 Publié dans Togo | Lien permanent | Commentaires (8)

Commentaires

c'est un peu l'histoire du chien qui se mord la queue : tant que les togolais ne seront pas plus instruits ils ne pourront demander des comptes à leur gouvernement, et comme ils ne demandent pas de comptes à leur gouvernement on ne s'occupe pas de leur instruction.
Si j'ai bien compris tu fais la classe à 40 enfants
Dommage que tu ne restes qu'un mois
Pour la division j'ai la fierté de t'informer que je sais encore les faire, mais c'est peut être parce que je n'utilise pas de calculette
En fin de compte il vaut mieux aller les aider sur place que d'envoyer de l'argent
Toujours aussi ravie d'avoir de tes nouvelles, bisous

Écrit par : maman | 10/01/2006

C'est vrai que la meilleure solution est d'aller les aider sur place, mais étant donné le maigre salaire, cela risque d'être difficile car nous ne sommes pas nés en Afrique.

S'il faut rester 8 ou 9 mois là bas avec peu d'argent et même parfois sans(car apparemment, les instituteurs ne sont pas payés certains mois) la vie risque d'être plus que dure. Moi je sais peut être diviser, mais je ne sais pas vivre comme les afriquains et m'en sortir avec peu de moyens. Pour le coup, je leur dis BRAVO!

Mais donc au final, on en revient toujours au même. Il faut de l'argent.
Peut être que si l'argent que l'on envoi était mieux employé (par exemple utilisé pour payer des instituteurs, ou pour les soins),l'afrique s'en sortirai plus facilement.

Dis Youri, pourrait tu nous dire comment cela se passe dans le domaine de la médecine a l'occasion.

Écrit par : Yann | 11/01/2006

hola youri,

tout d'abord bonne année a toi ! sympa d'enrichir ton site regulierement, et agréable à lire qui plus est ! sincerement c tentant de te suivre quand on voit les photos ( tu fais bien le "parfait planteur" avec le chapeau de paille !) !
bon courage pour la suite !

lilian

Écrit par : lilian | 11/01/2006

Salut mon Youri,
désolé de ne pas prendre le temps de t ecrire d avantage. Ca doit te faire drole d etre instit, pour autant d eleves qui plus est. Ton experience me rappelle sensiblement celle que j ai vecu quand j etais surveillant au college. Quel foutoire c etait! En revanche le sentiment d utilité doit etre tres fort pour toi. Ta mere a raison lorsqu elle parle de cercle vicieux. Sans education pas de pouvoir d action sur les gouvernements et encore moins de temoignage sur l entrave à l accés à l education, aux soins, à la dignité. Parfois je me demande a quoi sert mon travail de collecte de fonds pour les ong puisqu on a jamais de visibilité sur l aide au developpement. Et surtout, je ne sais pas vraiment quoi dire lorsqu une personne dans la rue me demande quel est l impact de toutes ces ressources collectées sur les populations locales du Soudan, Nigeria, Niger Etc. On sait malheureusement que les autorités locales ont souvent la main mise sur ces ressources et qu elles en font ce qu elles veulent.
En tout cas le rôle que tu detient est, à un certain niveau, bien plus efficace que toute la tune du monde destinée à l aide des pays en developpement.
Bon moi j ai une petite bronchite alors je retourne me coucher.
A bientot alligator
clem

Écrit par : clem | 12/01/2006

C'est pas évident.Qu'es ce qui est le plus utile : aller sur place ou envoyer de l'argent. Une des institutrices me demandait si ça me plairait de venir enseigner pendant toute une année.Moi j'ai quand même le sentiment que les mieux placés pour enseigner aux élèves togolais ce sont les enseignants togolais. En plus, si je regarde le prix du billet d'avion pour venir (700 eurosminimum), je me rends compte que ça équivaut à 3 ans de salaire d'un prof...
Mais d'un autre côté, c'est vrai qu'envoyer de l'argent directement, il y a un gros risque que l'argent disparaisse en chemin. Mais en étant sur place, je commence à connaitre des associations efficaces, comme la JSA. Ce qui est efficace également c'est les petits projets, par exemple les associations qui centrent leur action sur un seul village. Car dans ce cas les relations sont directes. On sait qui se charge des projets. Il est très utile de connaître des personnes fiables. Mais c'est vrai que pour ça il faut d'abord venir sur place.

Écrit par : Youri | 13/01/2006

Quelle belle transition !!!
Merci Youri pour toutes les infos, et pour l'analyse que vous faites régulièrement sur la situation de ce pays.
Pour répondre à Yann, sur la santé : il n'y a aucune aide sociale au Togo, donc, AVANT de voir un médecin, ou d'entrer à l'hôpital, vous devez déposer l'argent nécessaire !!!
Un exemple de prix : La jeune Nathalie, qui habite Adéta, souffre d'une hernie ombillicale. Pour son opération, il faut prévoir 140 000 FCFA (analyses, médicaments et opération) A cette somme, il faut ajouter l'argent pour le déplacement aller-retour Adéta-Kpalimé, la nourriture pour les deux semaines d'hospitalisation, pour elle-même, sa petite fille (trop jeune pour rester à la maison) et sa soeur qui va servir d'infirmière et préparer les repas pendant le séjour, pour 80 000 FCFA !!!
Quand un instituteur gagne environ 15 000 FCFA par mois (lorsqu'il est payé!) on peut se demander qui a accès aux soins? (et encore faut-il trouver des médecins, car ils ont souvent préféré quitter leur pays, on en trouve beaucoup en France !!!)
Au Togo, les pauvres meurent en silence, dans un silence insuportable pour nos consciences.
Nous connaissons Nathalie, et nous l'apprécions pour son courage, mais combien de "Nathalie" attendent une aide?

En ce qui concerne les enseignants, savez-vous que les instituteurs de campagne sont moins payés qu'en ville (mais si, c'est possible!) en échange, ils ont un terrain à disposition, qui sert de jardin potager. Les enfants de l'école doivent une demi-journée de travail à l'intituteur pour l'aider au "champs" et une demi-journée pour l'entretien du jardin scolaire (dont le bénéfice viendra grossir la caisse le l'école et servira à payer les enseignants volontaires)
Heureusement, il y a des solutions, mais je suis d'accord avec votre analyse sur les aides de proximité, comme nous pouvons le faire à Bogo. Il faut vraiment avoir un réseau sur qui on peut compter, et chaque euro arrive bien à destination!
Bon courage et merci pou eux.
Marie-Claire

Écrit par : Marie-Claire | 13/01/2006

Bonsoir Youri,

Je lis toujours avec un immense plaisir les récits très imagés de votre séjour au Togo. J'y revis ce que j'y ai vu et connu.

Nous avons actuellement à Heudreville notre amie Togolaise et lui avons demandé où pouvait se situer l'école du Jourdain (elle ne voit pas vraiment, car 15 km à l'ouest de Lomé situe l'école en plein Ghana).

Pouvez-vous nous apporter quelques précisions ?

Merci.

Bon courage et continuez sur votre lancée.

Jean-Pierre

Écrit par : jean-Pierre | 13/01/2006

Oui vous avez raison, je me suis trompé. C'est pas à l'ouest, c'est à l'est, après le port, derrière la Raffinerie, vers le quartier Kagomé et Ademawo. A l'ouest en effet, c'est la frontière avec le Ghana, à environ 1 kilmètre du centre ville. Je suis allé y faire un tour la dernière fois pour voir ce que ça donnait et vraiment la ville s'arrête net. Il y a un grillage gardé par des militaires et de l'autre côté, c'est la campagne!

Écrit par : Youri | 14/01/2006

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